Les belles histoires de Tonton PierreLorsque l’on pratique, comme moi, la théologie comparée, il est amusant de voir le rôle central de la nourriture dans la religion, la place essentielle des repas dans la compréhension du phénomène religieux.

La théologie comparée, rappelons-le, est la comparaison des religions entre elles et, éventuellement, la comparaison entre la version d’une époque et la version d’une autre époque de la même religion.

Le repas, en tant que point focal de la vie sociale, est évidemment essentiel dans le phénomène social qu’est la religion. Il est l’occasion de manifester son appartenance en partageant un rituel. Partager un repas, sous le prétexte de la pureté des convives, peut même être un signe d’appartenance à une communauté. Etre exclu d’un repas, d’un plat commun, peut, à l’inverse, être le signe que l’on ne fait pas partie de la communauté. Chez certains Juifs, il s’agit du repas quotidien de la famille. Chez les Catholiques, il s’agit du repas sacrificiel de l’eucharistie.

De la même façon, le sacrifice du repas est un signe essentiel d’appartenance (ou de non-appartenance). Le meilleur exemple est le jeune, partiel ou total. Interdiction de la viande le vendredi, jeune du jour lors du mois de Ramadan, etc.

De même, les règles relatives à la nourriture relèvent souvent d’un rituel dont le sens initial a été perdu. Mais respecter le rituel est un signe d’appartenance. Pourtant, la règle initiale a souvent du sens. Mais dans un contexte donné.

Ainsi, le porc est interdit dans toutes les religions du Moyen-Orient. Pas dans les autres régions du monde où l’animal est présent (Europe, Asie du Sud-Est). Pourquoi ? Pour plusieurs raisons très simples. La première est écologique. Le porc consomme beaucoup d’eau et le même genre de nourriture que l’homme. Elever un porc, c’est renoncer à nourrir une famille humaine lorsque les ressources sont rares. La deuxième raison, hygiénique, est que, même salée, la viande de porc ne se conserve pas sous le climat du Moyen-Orient. En consommer peut donc rendre malade voire tuer.

De même, boire de l’alcool en Europe peut ne pas poser de problème consommé de manière raisonnable et c’est même une façon de stériliser l’eau. A l’inverse, sous le soleil du Moyen-Orient, l’ivresse agressive vient vite. A une époque où chacun a un couteau à la ceinture, l’alcool devient vite une malédiction.

Et les exemples pourraient se multiplier. Comprendre permet de dépasser les rituels, les incompréhensions, encore une fois.