« Don’t look up : déni cosmique« , « Raya et le dernier dragon » et surtout « The power of the dog » sont en compétition pour les Oscars 2022. Avec douze nominations pour « The power of the dog« , excusez du peu. La particularité de ces films ? Ils ont été produits et diffusés par et pour des plates-formes de vidéo-à-la-demande comme Netflix, Disney+ ou Amazon Prime. Pour la prestigieuse Academy of Motion Picture Arts and Sciences, le canal de diffusion n’a aucune importance : c’est un film, cela peut concourir.

En France, aussi bien à Cannes qu’aux Césars, point de cette ignominie ! Seule une sortie en salle obscure vous permet de concourir. C’est malheureusement un grand classique de la « culture » en France.

Les critiques, les professionnels et même les amateurs, en France, jugent d’abord avec leur snobisme. Films, livres, musiques : tout doit être diffusé dans des canaux bien précis, bien traditionnels, respectant les soi-disant filtres du bon goût. Autoproduction, auto-édition ou SVoD ? Mon Dieu ! Quelle horreur !

Aux Etats-Unis (ou ailleurs), d’innombrables oeuvres sont d’abord diffusées par des canaux parallèles ou innovants et rencontrent le succès. Des acteurs traditionnels se servent des canaux parallèles ou innovants pour s’inspirer. Les sagas Twilights ou Hunger Games sont ainsi avant tout des romans auto-édités ayant rencontré le succès et généré une communauté de fans avant d’être des oeuvres éditées, traduites et converties en films à gros budgets. En France ? Non.

En France, on défend les petites librairies de quartier qui râlent depuis un siècle contre les chaînes, les grandes surfaces spécialisées, les grandes surfaces généralistes, la vente en ligne… Aux Etats-Unis, tu peux toujours râler, si tu ne t’adaptes pas, si tu n’es pas meilleur que ton concurrent, tu meurs. Et tout le monde trouve cela normal. La seule règle est que chacun doit être à armes égales, sans abuser d’une position ou d’un cartel. Le prix unique du livre pouvait se justifier quelques années pour donner du répit à de petites entreprises. Aujourd’hui, c’est une gêne pour qui (comme moi) cherche à multidiffuser en omnicanalité : je suis obligé d’aligner le prix de vente sur les nécessités du canal le plus coûteux.

De la même façon, en France, on défend les cinémas. La chronologie des médias, obligatoire, ralentit la conquête d’un public, oblige à multiplier les phases de promotion d’une oeuvre cinématographique. Pour quelle raison ? Favoriser des entreprises qui refusent de prendre en considération les attentes de leurs clients.

Certes, il est nécessaire et légitime de défendre notre identité culturelle. Mais certainement pas de défendre becs et ongles des acteurs obsolètes. Ce n’est pas l’intérêt des créateurs. Ce n’est pas l’intérêt du public.